... 704, dormir ou ne pas dormir
"Le désir, c'est ce qui résiste au sommeil".
Serge JONCOUR
Balade d'une dévoreuse de livres
"Le désir, c'est ce qui résiste au sommeil".
Serge JONCOUR
Roman.
Difficile de parler de ce livre-là. Ce que je peux dire, c'est que j'ai vraiment aimé l'histoire de départ, et que j'ai été tenue par ce point de départ très excitant... et puis je crois qu'il a joué trop souvent avec mon attente et mon impatience ! Et au bout du compte, j'ai été relativement déçue, je le regrette...
C'est donc l'histoire d'Edgar Drake, accordeur de pianos à Londres. Sans doute agé d'une trentaine d'années, passionné par son métier et ses pianos, surtout les pianos Erard et vivant une vie paisible et douce avec son épouse aimante Katherine... Et puis... On lui propose d'aller réparer un Erard, dont il existe peu d'exemplaires... au fin fond de la Birmanie. Il sait peu de choses sur les contours de sa mission, mais il accepte, et part donc retrouver un mystérieux Docteur, et militaire réputé pour user de méthodes pacifiques pour arriver à la paix de cette région tourmentée...
Commence une épopée un peu brouillonne, bien écrite cependant, entre le rêve et le réel, un peu un écho de l'Odyssée et du voyage d'Ulysse... Ulysse veut-il réellement rentrer chez lui ? Pourquoi Edgar reste-t-il si longtemps ? Bref... On attend longtemps le piano et la rencontre avec le médecin... Et après, on ne sait pas trop où le livre nous mène... Mais c'est exactement l'histoire qui veut ça !
Un voyage en Birmanie, cependant, et au coeur de la jungle...
. L'accordeur de piano, Daniel Mason, 2003. Ed. Plon. (Pocket).
Roman.
Depuis le temps que j'entendais parler de ce livre, référence mythique ! Lui aussi, m'attendait, dans ma bibliothèque... Emotion, en le sortant de son rayonnage, et en me disant que j'allais enfin, savoir... Alors, j'ai lu le livre qui inspira le film Out of Africa....
Il se lit très lentement, enfin, je l'ai lu très lentement. Il est comme un journal intime, presque comme un journal "parlé" de la baronne Blixen qui part s'installer en Afrique au moment de la première guerre mondiale, devenant celle qui tient les rênes d'un domaine caféier, d'une ferme avec des boeufs, des chevaux... Cela ressasse énormément, il n'y a pas de narration à proprement parler, enfin, pas véritablement une histoire qui court dans tout le livre et nous mène ; c'est plus la narration de petits faits quotidiens, plutôt détaillés... Parfois passionnants, parfois un peu ennuyeux ! Mais elle décrit les moeurs des différentes peuplades (les Somalis, les Masaïs, les Kikuyus...) qui vivent à ses côtés, ses salariés souvent, ou ses domestiques, alors en cela c'est intéressant... Et puis bien sûr, la nature, et ses animaux sauvages... C'est ce qui m'a le plus intéressé, je dirais... Il y a (je le dis à l'attention des grands amoureux des bêtes) une rudesse difficile, à leur encontre, dans le livre... C'est parfois troublant... Enfin cette grande chasseuse, de lions notamment ne renonce jamais à tuer un animal (sauf par des moyens qui ne lui laissent aucune chance), mais ne peut les supporter captifs... Il y a à ce propos une très, très belle page sur une girafe qu'on emmène et donc qu'on déracine, elle parvient à la rendre très sensible, très touchante... Pas trace d'histoire d'amour dans ce livre, ce qui m'a surpris ! En fait, les hommes qui passent, Denys notamment sont désignés comme des amis, non comme des amants ; et comme elle décrit ce qu'ils font ensemble, nous voyons qu'il n'y est pas question de rapprochement des corps... Ce sont des amis qui trouvent une grande joie à revenir partager des moments avec elle et repartent...
Et puis, il y a la fin de l'aventure Afrique, lorsque la déroute la contraint à tout vendre...
Je suis contente de l'avoir lue. Je pourrai relire des passages, puisque finalement, ça se lit ainsi, je trouve, plus comme un documentaire que comme un roman...
. La ferme africaine, Karen Blixen, 1937, Folio.
"Quand on songe à la charrue, à l'épée et à la roue, on peut dire que tout ce que la civilisation offre de bien et de mal sommeille dans le fer. C'est en petit toute la victoire de l'homme sur la nature".
Karen BLIXEN, 1937
"En Europe, ceux-là mêmes qui voudraient écouter l'histoire qu'on leur raconte ne le peuvent plus, ou bien ils s'agitent ou bien, s'ils ne peuvent penser à ce qu'il est urgent d'accomplir, ils s'endorment".
Karen BLIXEN, 1937
"La volupté du rêve c'est cette liberté qui vous pénètre comme la lumière ou l'air des sommets, qui répand en vous une joie surhumaine".
Karen BLIXEN
Roman.
Encore un livre miraculeusement et précieusement glané au fil de mes anciennes pérégrinations, et que je n'avais pas trouvé le temps de lire... Bénies soient-elles, et mes impulsions rarement contrariées d'acheter des livres d'occasion ! Je leur connais, particulièrement, un sens, depuis deux mois, sans commentaire.... !
Bref. Celui-ci. J'avais énormément aimé La drôle de vie de Zelda Zonk, ainsi que Miss Cyclone. Celui-ci me laisse plus sur la réserve... Je n'ai pas adhéré à la première partie du livre, tellement "trop" ! Alors, tout ce que j'aime, pourtant, on se croirait dans Dowtown Abbey... Mais, là, on n'y croit pas ! Enfin, moi je n'y ai pas cru... (C'est cette partie du livre qui donne son titre au roman, l'Aile des vierges) : ça se passe en 1946, et l'attitude de la jeune femme, Maggie, est trop moderne pour qu'elle soit crédible à mon sens, dans sa façon intime de penser, son langage, ses actes, ses préoccupations... Evidemment, on a envie d'aimer, mais l'anachronisme est tellement criant (à mon sens) ! L'immédiate après-guerre, dans un manoir anglais aristocrate... Et ce qui s'y passe, ce coup de foudre, je ne vous en dis pas plus, m'a paru encore trop peu crédible, même si évidemment on a envie là encore de mettre notre raison en berne et d'y croire ! Bref.
Finalement, la seconde partie du livre, même s'il ne s'y passe évidemment pas ce qu'on a envie qu'il s'y passe comme dans un sirupeux roman d'amour (donc, hein, il ne se passe pas ça, vous suivez ? :), eh bien cette seconde partie du livre m'a permis de l'aimer davantage. Cette vie qu'elle prend à bras le corps, suivant sa part de rêve, sans rallier le rêve de l'autre pour ne pas renoncer au sien (évidemment cette question interroge)... Alors, elle s'accomplit. Mais dans quelle mesure le fait-elle parce que c'est son choix, ou la détermination de ses ancêtres, elles féministes, revendicatrices ?
Finalement un plaisir de lecture que ce livre (malgré des agacements). Déjà pas si mal ?
. L'aile des vierges, Laurence Peyrin, Calmann-Levy 2018 ; Pocket.
Roman.
La tranche de vie sur quelques semaines puis trois quatre ans, d'une famille juive, ou ce qu'il en reste : les femmes ! Autour de Camélia, la narratrice, la jeune femme, qu'entourent jusqu'à l'étouffement une mère et trois de ses quatre tantes... Ah, quelle saveur que cette petite bande ! Elle pourrait aller jusqu'à l'écoeurement pour certains, moi je dois dire qu'elle m'a réjouie. Donc, ce petit monde vit à Paris, exilé d'Egypte... Et justement, au Caire, la seule qui y est restée, Carlotta, vient d'y décéder. Conseil de famille, que faire ? Camélia se propose d'y aller, sur les traces d'un passé de son enfance, et de ses racines... Suivront quelques semaines sur place aux rencontres toutes plus bigarrées les unes que les autres, à commencer, par celle d'un duo, Ponto Novo et sa soeur, artiste-peintre, qui va marquer durablement son existence...
Alors, c'est savoureux. Excessif, et tellement jouissif dans ces excès ! J'aime particulièrement les appels téléphoniques de la mère de Camélia, Louna, à sa fille, à chaque moment du jour, appels interminables et longs monologues tellement drôles et touchants à la fois... Le langage est un des plaisir de ce livre, et justement, le langage, central, et sa privation, tragique, mais traité avec distance et sans pathos sur la fin du livre... J'ai peiné au coeur du livre, j'ai trouvé un peu longues les péripéties autour de l'hospice et des "asiliaires", au Caire, autour de l'Allemand et du Rabin qui n'a pas assez d'ouailles pour ses offices, c'est sans doute ce qui ne vaut pas plus de sourires pour moi.
Cependant, c'est une découverte totalement hasardeuse lors d'une de mes pérégrinations chez les bouquinistes de Bécherel avant, quelle bénédiction... Je ne connaissais absolument pas cette auteure, encore moins son livre. Je ne regrette pas sa lecture !
. L'héritage de tante Carlotta, Paula Jacques, Mercures de France, 1987. Livre de Poche Folio 1990.