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"Je suis homme, et rien de ce qui est humain ne doit, je pense, me laisser indifférent".
TERENCE
Balade d'une dévoreuse de livres
"Je suis homme, et rien de ce qui est humain ne doit, je pense, me laisser indifférent".
TERENCE
Qu'est-ce que
je fais : j'en parle ? J'en parle pas ? Dans la mesure où je ne l'ai pas fini, normalement, je ne devrais pas en parler.
Mais comme j'ai vraiment l'impression d'avoir été dupée par ce titre... et que je me suis quand même TAPE 230 pages... Espérant vraiment comprendre quel message (fin) l'auteur nous ferait passer pour illustrer ce titre...
Mon insatisfaction allant grandissant, face à cet éparpillement de personnages inconsistants (oups ! je m'arrête là), je voulais au moins que vous soyez prévenus. Et je m'arrête là, donc !
"Il n'y a qu'un pas entre penser à quelqu'un et s'efforcer de ne pas y penser".
Jennifer EGAN
Il y a
ceux qui sont faits pour être portés, dotés d'une force inépuisable, tel Alexandre Le Grand ; et il y a ceux qui avancent, coûte que coûte, plus laborieusement, mais avec conviction, et foi :
c'est ainsi que leurs actes prennent de la valeur, et qu'ils engendrent des destinées... Non des grands hommes, ou des héros qui marqueront l'Histoire comme les premiers, mais des âmes qui
laissent leur trace, et marqueront de leur empreinte les autres hommes, et le cours des choses... Dryptéis, est de ceux-là, héroïne tragique s'il en est, caractérisée par sa maternité, qui la
porte, et la transcende, elle qui veut, à tout prix, se résignant à sa tragique destinée, sauver, quitte à le perdre, son fils.
Laurent Gaudé nous chante l'Antiquité, plus qu'il ne nous la raconte ; un temps fait de combats, d'alliances fugitives, de destinées tragiques, de morts et de croyances... Il nous donne envie de relire les grands tragédiens antiques, ou même l'Antigone d'Anouilh...
Des images puissantes jaillissent de ce texte ; des images marquées par le sceau du symbole, plus que par le réel.
Il nous livre un récit lyrique, du registre de l'incantation ; marqué par l'enchâssement des points de vue, que la mort ne capture pas, puisque les morts comme les vivants, omniscients, continuent de voir et de raconter, comme devenus souffles, portés par le vent...
Le récit est tout entier contenu, ramassé, dans cette phrase qui fait une boucle, ceint au début puis à la fin du livre par cette apostophe : "A qui appartiens-tu, Alexandre ?" ; cette phrase qui résonnait alors comme une accusation, et qui finit comme une leçon, "A qui appartiens-tu, Alexandre ?" "A vous mes compagnons, qui me ressemblez, à vous mes rêves lointains que je n'ai pas réalisés mais qui m'ont portés (...), à mes compagnons lancés au galop dans la plaine et à l'éternité qui s'ouvre devant moi".
A découvrir.
. Pour seul cortège, Laurent Gaudé, éd. Actes Sud. 2012.
"Etre dans le coeur vif des choses où les instants passent avec lenteur et où tout est vital".
Laurent GAUDE
J'aime ce livre qui réhabilite le langage des
fleurs !
Attention cependant, avec ce livre, on est loin du romantisme et d'une certaine mièvrerie qu'il pourrait induire ! Au contraire, car le personnage principal, la jeune Victoria, est un personnage rude, abîmé par la vie...
On va découvrir son histoire par périodes croisées : l'année de ses 9-10 ans, et celles qui suivront ses 18 ans.
Sa vie est marquée par l'absence de parents, par les foyers de vie pour orphelins, et les placements en familles d'accueil.
On est entrainé dans ses ressentis nourris d'attentes, d'espoirs déçus, qui font que la jeune femme ne peut plus faire confiance, ni recevoir, de peur que rien ne dure, et qu'elle ne soit pas à la hauteur de ce qu'elle reçoit. Les échecs de sa vie l'ont rendent dure, fuyante, enfermée dans sa solitude et sa souffrance...
Il y a cette femme Elisabeth, sur le point de l'adopter lorsqu'elle avait neuf ans, et qui rompt son serment... Alors que pour la première fois la fillette est heureuse... On souffre avec elle, on comprend son énorme douleur et son rejet de tout, tant la déception est immense, et les illusions blessées cruelles...
Malgré tout confrontée à l'obligation de gagner sa vie, Victoria construit son destin, autour de l'amour des fleurs, et de l'extraordinaire don qu'elle tient de cette Elisabeth.
En partie recluse, elle qui cherche les abris pour se protéger des autres. Tapie dans sa minuscule chambre bleue à la moquette épaisse, enfermée derrière 6 verrous, elle a un peu de l'Esclarmonde de Carole Martinez, et un peu de Lila K. A vif, avec une extraordinaire opiniatreté, elle va construire un dictionnaire des fleurs qui va faire son extraordinaire succès à San Francisco. Etre aimée. Et fuir...
Les rechutes, les fuites sont terriblement éprouvantes pour le lecteur. Tellement habitué à un parcours initatique crescendo ! Ici les rechutes font reculer le personnage à un point qu'on redoute radical, souvent.
Mais de très beaux personnages dans ce livre, aimants et sans attentes, dans l'abnégation l'aident sans doute à s'en sortir : Elisabeth bien sûr, mais aussi Renata, la fleuriste, la première à lui faire confiance professionnellement, et aussi l'enfanteuse, Maman Ruby, et LE personnage masculin du livre, le jeune Grant...
Les fleurs et leur langage ont une si belle place dans ce livre... Et on se prend à rêver que les fleurs retrouvent leur véritable signification, et qu'elles servent de "messages" à nouveau, à exprimer des ressentis, des convictions ou des regrets... !
. Le Langage secret des fleurs, Vanessa Diffenbaugh, éd. Presses de la Cité, 2011.