Un amour :)
Ah,
le bonheur de retrouver Dino Buzzati, j'avais tellement aimé son Désert des Tartares, ainsi que ses nouvelles, le K ! Le plaisir n'est pas démenti, avec ce livre.
C'est l'histoire d'un presque quinquagénaire (49 ans), architecte, et de sa passion dévorante pour une toute jeune prostituée, Laïde, sur près de deux ans. Passion qui se transforme en obsession, et qui l'asservit, sans qu'il puisse faire appel à sa raison et résister, se redresser, fuir...
"Tu as voulu oublier ton âge ? Tu as défié avec tes seules forces la méchanceté d'une fille qui montait à l'assaut de la vie ? Tu t'es obstiné en un jeu inconnu qui n'était pas fait pour toi ? Tu as cru que tu pourrais redevenir un enfant ?", lui dit en guise de leçon, une autre prostituée, à la fin du livre. Un livre qui nous montre aussi à quel point on est aveugle en "amour" tant qu'on ne veut rien voir !
C'est formidablement décrit. Les tourments d'Antonio, les facéties et la fausse candeur de la jeune femme, le faux cousin Marcello, les mères maquerelles... Et la ville de Milan, fond souvent nocturne du roman, qui a une place si belle aussi dans ce livre, ainsi que la ville de Modène.
On aime, la formidable leçon de l'autre prostituée, à la toute fin du livre ; celle qui lui dit qu'évidemment il se trompe, et que ce qu'il vit n'est pas l'amour ! Ses tourments n'ont rien à voir, et d'ailleurs, que lui donne-t-il lui pour valoir qu'elle l'aime en retour ? Sa suffisance de petit bourgeois, alors même qu'il veut juste la tenir prisonnière, et ne lui propose même pas d'entrer dans son cercle d'amis, familial, ou le mariage ?...
C'est une écriture qui court, qui coule, qui emporte. Dans les tourments de la passion amoureuse, savoureux. Et qui parle de l'illusion qu'on peut préférer alors même qu'elle est terrible, parce qu'elle nous cache ce vers quoi l'on court si sûrement, la mort...
Merci beaucoup Patricia pour cette lecture, c'est à toi que je la dois !!
. Un amour, Dino Buzzati, 1963 (Italie), Robert Laffont, 1964.