Les heures souterraines :)
Je n'avais lu de Delphine de Vigan que "No et
moi", celui-ci dont on m'avait parlé à plusieurs reprises m'attirait. Merci donc à Nico d'avoir exaucé mon souhait en me prêtant "Les heures souterraines".
C'est l'histoire croisée de Mathilde et de Thibaud, tous deux parisiens. Mathilde vit seule avec ses 3 enfants, elle est cadre dans une grosse entreprise et tout se passe bien jusqu'à ce qu'elle ose... suggérer une discrète contestation de son patron. A partir de ce moment, commence une descente aux enfers, extrêmement bien rendue, de la jeune femme, qui se retrouve petit à petit évincée par le dit patron. Tuée professionnellement. On touche du doigt sa souffrance au travail. Thibaud est médecin urgentiste, il intervient à domicile, pour tous ceux qui souffrent, sont au bout du rouleau... Il sort d'une histoire sentimentale douloureuse, éreinté par le manque d'amour de sa compagne, quand lui en attendait trop. On sent dans ce livre toute l'apesanteur qui pèse sur les épaules des êtres solitaires, contraints de poursuivre une vie nécessaire. L'isolement, l'individualisme, sont au coeur de ce livre, même s'il y a de très très rares percées humaines, mais qui ne suffisent pas à remettre à flot le naufragé isolé...
Les déplacements dans l'espace parisien sont une des métaphores de ces vies qui ne se rencontrent jamais : Thibaud dans sa voiture régulièrement prisonnier des embouteillages, seul dans l'habitacle de sa voiture ; Mathilde dans les couloirs souterrains du métro, où tous, petites fourmis besogneuses, doivent répondre à des itinéraires efficaces et vains...
Je me suis dit qu'il y avait un "trop" dans ce livre : en plus de ce qui lui arrive, Mathide a une histoire extrêmement douloureuse, sentimentalement : son mari est mort dans un accident de voiture alors qu'ils partaient prendre une bouffée d'oxygène le temps d'un week-end qui s'annonçait heureux... Ca, je me suis dit que c'était trop ! Cela dit, j'ai beaucoup aimé la manière dont était donnée à voir ces vies solitaires, et particulièrement ce que pouvait être la machine destructrice du travail, lorsqu'un grain de sable s'immisce ; et ce à quoi on se raccroche, pour ne pas sombrer, et sortir la tête de l'eau coûte que coûte, alors que la tentation est si grande de se laisser submerger... Très sensible.
. Les heures souterraines, Delphine de Vigan, août 2009.