La théorie du panda
La théorie du panda... C'est sans doute "la
capacité d'être aussi bien partout que n'importe où". A l'image de ce gros panda de peluche, gagné sur une fête foraine, au large faciès souriant, Heureux en apparence où qu'on le pose...
Comme sur ce bar, où l'installe José, un des personnages du roman, il sourit toujours. Gabriel avait l'air d'être comme ça. Il est de passage dans un petit village breton, et s'accomode de tout,
fait le bien où il passe, donnant, confectionnant de bons repas à des convives d'un ou de plusieurs jours. Ca aurait pu n'être que ça. Assez joliment tourné. Mais on découvre petit à petit, par
bribes, l'histoire, terrible, de Gabriel. Sur fond d'un fait-divers insensé, impensable, inacceptable, qui a marqué et transformé sa vie. Et ce que ce personnage en fera est non moins
incompréhensible. On reste abasourdi par les quelques courts épisodes sanglants, initiés par l'idée selon laquelle puisque le bonheur est là, ou presque, il faut arrêter l'instant pour faire que
plus jamais il n'y ait de bas. Quitte à tout détruire, à commencer par des vies. Evidemment ce personnage est marqué par ce terrible fait-divers. Mais...
Je suis restée sans voix, ou presque à la lecture de ce livre, et aux voies qu'il explore. Où l'on détuit parce qu'on a a mal, pour ne plus croire encore et souffrir à nouveau. Un livre étrange, qui gonfle comme une bulle de savon et éclate dans un dernier sursaut, pour tuer presque tout espoir.
Avec une place centrale pour la nourriture et toutes ses fonctions secondaires ; la nourriture convivialité, don, à travers l'acte de préparer, d'offrir et de partager un bon repas ; la nourriture expression d'un mal-être ; et la nourriture jusqu'à l'auto-destruction, avec cette histoire étrange de ce type qui mange son armoire parce qu'il la décrète responsable de la mort de sa femme...
Avec des personnages adultes paumés comme des adolescents, confrontés à la gratuité de l'existence ; celui qu'on pense le plus adulte (Gabriel) se révèle (on ne sait pas encore ce qu'il a vécu) marqué par une très sombre histoire et choisissant une voie trouble qui procure un profond malaise...
Etrange découverte d'un univers où l'on est installé confortablement, ou presque, et qui bascule...
. La théorie du panda, Pascal Garnier, éd. Zulma, 2008