Heureux les heureux
Ce que ces petits
textes sont habiles ! Yasmina Reza nous tisse une petite communauté d'hommes et de femmes, et braque la lumière tantôt sur l'un, tantôt sur l'autre, de l'intérieur.
Elle nous livre donc des scènes brèves, des percées dans des vies installées, des tranches de vie du quotidien. Des hommes, des femmes, saisis dans la justesse de leurs renoncements, leurs petites médiocrités, qui les rendent si humains, et si justes.
Coup de coeur pour le premier texte, qui saisit Robert et Odile au supermarché, lui tellement limité à ses propres exigences (l'écriture de son article), tellement loin des contraintes réelles (nourrir leurs deux enfants), divergence cristallisée par le choix du fromage. Et puis il y a encore la douleur pudique qui enrobe l'histoire des parents de Jacob, qui se prend pour Céline Dion... On a un peu de mal à s'y retrouver, avec tous ces noms, mais ça ne gêne en rien la lecture.
Je regrette toutefois la fin : je n'ai pas aimé qu'il nous plonge dans ces funérailles, avec ses épitaphes et ses histoires de crémation, parce qu'à mon sens, cela donne une couleur mélancolique et définitive que ce livre n'avait pas jusque là. L'humour et la légèreté finissent finalement un peu plombés... Toutefois, ce premier livre que je lis de Yasmina Reza ne m'aura pas déçu.
"Les femmes se construisent, à l'intérieur d'elles-mêmes, des palais enchantés".
• Heureux les heureux, Yasmina Reza, éd Flammarion. Janvier 2013