Trois femmes puissantes :))

Roman.
Prix Goncourt 2009.
Depuis que j'ai ouvert ce livre, et tout au long de sa lecture, je songe à ce titre... Ce titre qui résiste, et c'est très bien comme ça, il ajoute de la densité, même s'il n'en manquait pas. Alors parfait. Je réfléchirai encore longtemps, à ce titre, à ce choix... Car il n'est pas évident que les récits mettent au coeur un personnage féminin, déjà ; quant à les dire puissantes... C'est très très intéressant, d'autant plus, finalement.
En première partie au coeur du livre le père, le père destructeur, dont la personnalité écrase fille, garçon, jusqu'à son paroxysme, mais toujours, pour qu'on puisse toujours possiblement en douter... Et puis sa fille, (la femme puissante ?), avocate, qui n'aura d'autre choix que de voler au secours de son frère pour le tirer de prison, elle qui aime tant son jeune frère, victime du père ; elle qui est à la merci de son trop gentil chéri... Le point de vue de la narration est extrêmement important, il change tout...
Puis, après un simple mot "contrepoint", on bascule dans une autre histoire, celle de Fanta, femme soumise... ? Mais c'est son mari qui raconte... Un mari aux prises avec son métier de vendeur de cuisines chez Manille, la chaleur, ses hémorroïdes, sa paranoa quant à sa femme et l'amour de sa femme...
Et puis la troisième histoire, non moins choc, celle de Khady : son mari mort l'a laissée à la merci de la famille de celui-ci. Qui finit par se débarasser d'elle, mais : elle se sentira libre, vivante, jusqu'au bout, et jusque dans tous les recoins de son dur parcours souffrant, de femme migrant...
A cela, ajouter que les trois tableaux sont tous aussi palpitants les uns que les autres ; on s'y plonge avec autant d'intérêt pour chacune des histoires ; les tableaux sont reliés par un fil ténu, éloigné, une même ville, une parente... Peu importe, mais cela ajoute du sel à l'ensemble, on se demande, on repasse en revue chacune des histoires pour vérifier qu'on n'y a pas croisé le nouveau personnage...
Et puis il y a le motif de l'oiseau. Qui lie aussi les trois histoires, en y introduisant la dimension non rationnelle de l'étrange, de ce qui ne s'étiquette pas facilement, de ce qui ne rentre pas dans une case... Car, comment ne pas songer à l'oiseau, quand elle nous parle du père dans la première histoire, lui qui passe toutes ses nuits dans le flamboyant (l'arbre) ? Et puis il y a la buse, l'obstinée, celle qui harcèle le second personnage, le vendeur de cuisines, et qu'il s'imagine être sa femme ; et puis enfin le corbeau, dans l'histoire de Khady, le corbeau c'est Lamine, l'ami qui trahit...
Ce livre résiste aux étiquettes et on ne l'en aime que plus.
Il est fort, une vraie belle découverte littéraire.
. Trois femmes puissantes, Marie Ndiaye, éd. Gallimard NRF, 2009.