Lettre d'une inconnue
Période où je relis les Stefan Zweig que j'ai tant aimés.
Celui-ci ne m'a pas conquise. Evidemment, est encore prodigieuse cette histoire, mais là, les personnages m'ont laissé en dehors, même le propos, je l'ai trouvé ressassé, répétitif, ce cher Zweig si génial a bien le droit à ses 'fragilités' me suis-je dit...
En tout cas, une enfant, 13 ans. Qui vit à Vienne, avec sa mère, une existence austère. Sans doute sans évasion. Son évasion, elle va la trouver tout enière à travers son voisin, dont elle décide de tomber éperdument amoureuse. Et ce jusqu'à sa mort. C'est le récit d'une obsession monomaniaque - ça ne nous étonne pas, Zweig y excelle à les dépeindre - une passion amoureuse exclusive et excessive - là aussi. Conjuguée à une personnalité effacée, qui peut se justifier par la rugosité de son milieu social, du cadre où elle a grandi, cela donne aussi un personnage fier, peu sûr de sa valeur, et qui va sacrifier sa vie à son souvenir. Mythifié, le garçon ne lui apportera jamais d'attention. Même lorsqu'elle le retrouve alors qu'elle a 18 ans, et qu'en séducteur il l'invite à dîner et qu'ils passent la nuit ensemble, même encore 9 ans plus tard alors qu'elle s'est débrouillée pour avoir les faveurs d'un riche amant, et qu'ils élèvent -momentanément, car elle ne veut épouser personne autre que son cher amour - le fis qu'elle a eu de cette union de quelques nuits, de cet homme dont elle s'est épris.
On lit tout cela par le biais d'une lettre, qui arrive entre les mains de ce voisin adulé, et alors que Zweig a pris soin de nous ôter tout espoir d'union ou de rapprochement : on sait d'emblée que le fils est mort, et qu'elle va l'être aussi, s'il reçoit sa lettre. Tragique, évidemment. Mais j'avoue que, si d'habitude je me laisse sans aucune hésitation emporter par la fougue et le talent de Zweig, il n'a pas suffi cette fois-ci. Sans doute que c'était trop, cet excès, cette obstination, cette sottise, cet entêtement... Même si en effet elle explique que si elle a préféré ne pas se faire connaître de lui en lui disant qu'elle avait un fils de lui, c'est parce qu'elle ne voulait pas qu'il l'aide à contre-coeur. J'ai été peu séduite par ces deux personnages-là, je l'avoue, et sans doute moins qu'à la première lecture.
. Lettre d'une inconnue, Stefan Zweig, 1922. Ed. Le Livre de Poche.