Lettre à la république des aubergines :)
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L'auteur est né à Bagdad ; libéré de deux ans de prison pour raisons politiques, il est parvenu à fuir son pays en 1996. Il vit en Allemagne aujourd'hui. La biographie de cet auteur a d'incontestables résonnances avec son court roman, léger et grave tout à la fois : plusieurs chapitres nous donnent des voix, à lire, à commencer par celle de Salim, un jeune étudiant emprisonné puis libéré sur l'intervention de sa famille qui n'a d'autre choix que de s'exiler en Jordanie. Pendant deux ans, il pense à sa femme, restée là-bas, et veut lui écrire une lettre. Mais il craint pour sa vie. Alors on va suivre les rouages complexes, souterrains, clandestins, d'acheminement d'une lettre d'amour. En entendant plusieurs voix, dont des chauffeurs de taxi, des proches du gouvernement... Sans affects, tachant de vivre dans des situations prédestinées par la force d'un régime. La voix, la dernière voix et seule féminine, la femme de celui qui veille à la sûreté traquant les lettres est intéressante : on y voit la condition de la femme, tellement écrasée par plus fort qu'elle, qu'il vaut mieux souvent se taire, ne pas savoir pour continuer à avoir une vie à peu près dorée si tant est que ce soit le cas. Pourtant, elle va entrer dans le bureau de son mari (défendu), trouver cette lettre et chercher à voir, à savoir, peut-être à sauver cette femme...
Pourquoi Lettre à la république des aubergines ? On apprend dans le roman que la république des aubergines' est une façon d'appeler l'Irak, parce que les guerres ont fait qu'il reste tellement peu à manger qu'il ne reste que des aubergines, que les Irakiennes déclinent sous différentes façons pour varier les plats...
Le roman finit par un extrait de la lettre que le jeune homme cherche à envoyer à sa femme : "La légitimité de notre histoire réside sûrement dans le fait qu'elle n'est ni légitime, ni illégitime. Elle n'est qu'une histoire mésopotamienne". Ca résume sûrement beaucoup : dans ces contrées, la part de choix est tellement inexistante... Il faut tacher de se frayer un chemin qui épargne, c'est tout. Penser à cela est évidemment troublant, on n'est pas tous égaux, évidemment, en fonction de l'endroit où l'on naît...
Médiathèque de Saint-Malo.
Lettre à la république des aubergines, Abbas Khider, éd. Piranha, 2016, pour la traduction française.