La tête ne sert pas qu'à retenir les cheveux :)
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Roman ado.
Ah, les éditions Thierry Magnier, bénies soient-elles. J'y ai vraiment lu des pépites. Encore une lecture que je ne regrette pas, par leur biais.
Un livre sur l'excision. Qui cherche à informer, plutôt qu'à condamner de façon radicale. Informer pour faire cesser cette coutume barbare qui consiste à "mutiler" les fillettes pour maîtriser le plaisir des femmes. Enfin, ce que raconte une des protagonistes (du Sénégal), cette coutume est perpétuée par les femmes pour être dans la norme, parce que les femmes non excisées seraient ostracisées et malheureuses parce que non dans la norme ; mais les mères souffrent dans leur chair de faire subir cela à leurs filles...
C'est donc l'histoire d'Awa, 16 ans, qui vit en France, à Villepinte. Un jour, se plaignant de douleurs au sexe, elle ose aller au Planning familial et ... apprend qu'elle a été excisée. Choc. Révolte. Et peur, pour ses deux jeunes soeurs : l'ont-elles été aussi ? Pourrait-elle les sauver si cela n'avait pas été le cas ? Suit alors une histoire, menée avec un certain suspense, autour des deux soeurs ; avec rouages des services de protection mis en branle, surveillance pour protéger la toute jeune soeur, traque du réseau d'exciseuses qui perdurerait dans la région parisienne... Avec des passages hauts en couleur, parfois drôles, car le roman est traité aussi sur le mode de l'humour. Bien que didactique (on a parfois du mal à croire à l'âge des jeunes protagonistes tant ils paraissent dotés d'une maturité hors norme), le roman est séduisant, et amène aussi les réflexions sur le racisme, à partir là encore d'éléments concrets, scientifiques qui balaient la conception des races et donc du racisme. Ainsi, la tante, Dado, émancipée, enfin, vivant à l'européenne (mais elle aussi excisée), universitaire, amène des réflexions qui font rire mais font mouche, toujours basées sur des études sérieuses qui plus est. Les sentiments, la souffrance intime des protagonistes, les réminiscences d'un passé oublié sont là aussi joliment bien amenés et bien rendus. Tout cela sur fond de modernité, et donc entre modernité et tradition, à l'époque du web mais aussi avec l'apport de l'Afrique dans les moeurs de la banlieue, notamment la cuisine. En voulant éloigner les écueils des clichés, tournés en dérision par le biais notamment des scénarii cinémtographiques proposés à la jeune Ernestine, qui veut faire du cinéma, et qui finalement... ne se laissera pas enfermer dans les stéréotypes.
Entre légèreté et sérieux, sur un sujet grave, un joli roman, qui aborde un sujet fort avec une vraie histoire de fiction, et sans tabou.
Médiathèque de Saint-Malo.
. La tête ne sert pas qu'à retenir les cheveux, Pauline Penot et Sabine Panet, éd. Thierry Magnier, août 2015.